L'avènement de l'ère numérique a ouvert un monde d'opportunités pour l'agriculture. Afin de déployer des technologies efficaces au profit des petits exploitants tout en avançant dans une logique de développement durable, les partenariats et investissements multisectoriels sont cependant essentiels, affirme Michael Hailu. Le directeur du CTA analyse, au cours de cet entretien, les enjeux actuels de la digitalisation dans le secteur.
Que représente la digitalisation dans le travail du CTA ?
Le CTA met depuis longtemps les technologies de l'information et de la communication (TIC) au service de l'agriculture, à différents niveaux de la chaîne de valeur. Au cours des 20 dernières années, nous avons expérimenté et déployé de nombreuses TIC, depuis les CD-ROM jusqu’aux innovations les plus récentes, comme les applications mobiles et les données satellitaires. Nous testons ces technologies avec les agriculteurs et analysons la façon dont elles peuvent contribuer à l'amélioration de la productivité et de la rentabilité. Jusqu'à présent, nous sommes intervenus à petite échelle, mais le secteur privé et les gouvernements se montrent de plus en plus intéressés par l'usage des TIC dans le développement agricole.Trouver les solutions afin d'intervenir à plus grande échelle est aujourd'hui une problématique clé. Nous espérons que nos activités, qui permettent la capitalisation d'expérience, nous aideront à y répondre. Nous avons un rôle de catalyseur. Le CTA a déjà facilité l'accès des agriculteurs à ces technologies, mais pour envisager des actions élargies, nous devons maintenant collaborer avec les acteurs majeurs : secteur privé, gouvernements et autres partenaires de développement.
La digitalisation peut-elle aider à diffuser plus largement les technologies utiles aux agriculteurs ?
Absolument. Je suis convaincu que la digitalisation a beaucoup à offrir. Les nouvelles technologies peuvent notamment faciliter l'accès des agriculteurs aux marchés, tout en les aidant à améliorer leur productivité ou à renforcer leurs capacités de résilience. Grâce au numérique, ils deviennent en outre capables d'évaluer précisément les quantités d'engrais utilisées et de réduire l'usage d'intrants. Les retombées sont évidemment positives avec une amélioration des rendements et, donc, de leurs revenus. La digitalisation ouvre un champ des possibles immense. Nous devons investir de manière stratégique dans les innovations numériques afin de les rendre accessibles à un maximum d'agriculteurs.
Selon vous, dans la région ACP, y a-t-il une volonté politique de soutenir la digitalisation au profit des agriculteurs et du secteur agricole ?
La région ACP, qui regroupe 79 pays, est très vaste. Les politiques diffèrent donc d'un état à l'autre mais, de manière générale, il y a consensus autour de l'idée que la digitalisation représente une technologie de rupture. Aujourd'hui, les cinq plus grosses entreprises au monde viennent du secteur de la technologie. Son importance dans le développement et l'investissement ne peut plus être ignorée. La technologie est source d'opportunités, nous en sommes persuadés : elle peut favoriser l'inclusion et la mise en œuvre d'une agriculture rentable au bénéfice d'un plus grand nombre d'exploitants. De nombreux pays reconnaissent l'importance de l'agriculture, et la digitalisation représente un levier capable de transformer le secteur en profondeur.
J'ai récemment participé au forum de l'Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA, Alliance for a Green Revolution in Africa) à Kigali, au Rwanda. Le thème de la digitalisation figurait très haut à l'ordre du jour, preuve que le potentiel du numérique dans le secteur agricole est clairement identifié. Il a notamment été précisé qu'il était indispensable de faciliter l'accès des décideurs politiques aux différents types de données sur la production agricole. Plus largement, nous devons utiliser les technologies afin de rendre les données accessibles à un maximum d'utilisateurs.
Parmi toutes les initiatives du CTA liées aux TIC pour l’agriculture, certaines ont-elles échoué ?
C'est un fait : quand vous expérimentez de nouvelles technologies, le taux d’échec est toujours supérieur au taux de réussite. Plusieurs raisons peuvent expliquer ces revers comme l'utilisation d'une technologie non appropriée, l'absence de mécanismes de soutien, etc. Les échecs sont constants, mais chaque innovation qui fonctionne dévoile un potentiel significatif. Par exemple, nous avons travaillé avec des partenaires en Ouganda afin d'établir les profils des cultivateurs de thé en recueillant des informations sur leurs exploitations et coopératives à l'aide de drones. A la faveur de ce projet, les exploitants ont doublé leur productivité. L'objectif est désormais de déployer ces succès à plus grande échelle.
Comment les nouvelles stratégies du CTA peuvent-elles renforcer vos activités en rapport avec les TIC ?
Notre stratégie actuelle s’articule autour de trois grands axes :
- le premier consiste à promouvoir l'entrepreneuriat chez les jeunes et à créer des emplois pour cette génération ;
- le deuxième est notre programme de digitalisation, qui vise à renforcer la productivité et la rentabilité agricoles ;
- le troisième repose sur la promotion des innovations en rapport avec l'agriculture climato-intelligente.
Ces différentes priorités sont étroitement liées. Par exemple, en matière d’entrepreneuriat agricole, les technologies jouent un rôle fondamental car les jeunes affichent un intérêt prononcé pour le numérique. Ainsi, une grande partie de notre travail sur ce sujet consiste à identifier comment les technologies et l’innovation numérique peuvent soutenir les start-up lancées par des jeunes.
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