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Les forfaits de services verts, une ouverture aux pratiques climato-intelligentes

Les services groupés sont conçus pour être complémentaires : une combinaison d’efforts nécessaire pour mieux mettre en valeur les pratiques climats-intelligentes.

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En matière d'agriculture intelligence face au climat (AIC), l'expérience nous a appris une chose : les services verts, lorsqu’ils sont fournis de manière isolée, sont inefficaces et produisent des résultats très décevants. En revanche, quand ils sont regroupés dans des « forfaits » adaptés aux besoins des agriculteurs, ils favorisent davantage l'adoption de pratiques climato-intelligentes. Plusieurs exemples, tirés de projets initiés par le CTA, viennent appuyer ces observations.

Fatima est une petite exploitante qui vit dans la communauté rurale d'Ayigbe, dans le district de Wenchi, au Ghana. Elle cultive la terre, élève des bêtes et vend sa production sur le marché local. Sa pratique de l'agriculture pluviale est toutefois affectée par l’imprévisibilité croissante des précipitations : il lui devient ainsi difficile de déterminer le meilleur moment pour planter et éviter les pertes dues à la sécheresse.

Manti, producteur de cacao, est confronté à des problèmes similaires. Afin de compléter ses revenus, il s'est lancé dans la production de charbon de bois. Cette source d'énergie, abordable, est prisée dans sa communauté rurale, confrontée au manque d'électricité et au prix élevé du gaz. La contrepartie est cependant élevée : pour produire du charbon de bois, il faut abattre de nombreux arbres, un procédé qui impacte sévèrement l'environnement en accélérant la déforestation et le réchauffement climatique.

De la nécessité d'une approche holistique

Ces deux histoires illustrent bien la situation de nombreux agriculteurs des pays ACP soumis aux effets du réchauffement climatique. Selon la FAO, la population mondiale approchera le seuil des 9,8 milliards d'individus en 2050. La croissance démographique sera très soutenue dans les pays en développement, des zones particulièrement touchées par les changements environnementaux. Dans ce contexte, l'agriculture climato-intelligente semble une alternative intéressante à explorer. Mais que pensent les agriculteurs de ces pratiques ? Et comment peuvent-ils acquérir les compétences nécessaires à la mise en place de ce type d'agriculture tout en maintenant une rentabilité satisfaisante ?

De plus en plus, il apparaît que les connaissances techniques, seules, ne suffisent pas à stimuler l'adoption des pratiques intelligentes face au climat. L'approche doit être holistique pour fonctionner : on ne peut se contenter de fournir un seul « service vert » sans prendre en considération d'autres paramètres. Par exemple, en aidant Fatima à adopter de bonnes pratiques agronomiques, elle pourrait vraisemblablement améliorer ses rendements. Toutefois, afin de pérenniser son activité, elle aura également besoin d'une aide financière en plus d'un réseau de télécommunications fiable pour profiter des services de vulgarisation. Ces services, devront, en outre, être impérativement adaptés à son environnement pour être réellement efficaces. Enfin, elle devra pouvoir compter sur une ouverture facilitée aux marchés afin de lui assurer un niveau de revenus suffisant, condition sine qua non pour l'inciter à poursuivre dans la voie d'une agriculture climato-intelligente.

La preuve par le terrain

Les services groupés d’AIC peuvent prendre différentes formes mais doivent être pensés et conçus pour se compléter mutuellement afin de produire les résultats escomptés. Une combinaison d'efforts incluant à la fois le secteur public et le secteur privé n'est ainsi pas à exclure. Le projet initié par le CTA afin de promouvoir la compétitivité des chaînes de valeur agricoles en République dominicaine, en coopération avec ADOPEM, une banque de micro-crédit, est un bon exemple. Les agriculteurs participant au programme ont bénéficié d'un financement, d'une formation sur les pratiques durables et d'un accompagnement tout au long de la chaîne de valeur des tubercules (commercialisation, entreposage, manutention pendant le transport, etc.). L'expérience a été couronnée de succès : le taux de rejet des bananes a baissé de 40 à 30 % alors que le nombre de caisses exportées a connu une augmentation substantielle (de 1080 à 5200).

Le projet « Déployer à plus grande échelle des solutions d'agriculture intelligente face aux climat pour les agriculteurs d'Afrique australe » est une autre initiative démontrant tout l'intérêt d'opter pour une approche globale. Les agriculteurs bénéficient de forfaits de services qui incluent un accès facilité au crédit, des services de vulgarisation par SMS et des informations sur les pratiques AIC traduites en langues locales. Au Zimbabwe, par exemple, ces forfaits sont fournis par l'Union nationale des agriculteurs pendant que l'opérateur de télécommunications privé Econetla prend en charge la diffusion de l'information et l'enregistrement numérique des personnes. Concrètement, les avantages sont multiples : le projet incite les agriculteurs à souscrire une assurance fondée sur un indice climatique ; facilite leur accès aux informations concernant les pratiques climato-intelligentes ; améliore la mise en action des interventions techniques pour de meilleurs rendements ; et atténue les risques liés au changement climatique.

Le projet CLI-MARK, initié par le CTA, propose également des services groupés. Son objectif est de développer à plus grande échelle des mécanismes de marché qui augmentent les capacités d'adaptation des éleveurs nomades du nord du Kenya et du sud de l’Éthiopie. Dans cette optique, le CTA s'est associé à des acteurs issus des secteurs public et privé : l'Institut international pour la reconstruction rurale (IIRR), l'Institut international de recherche sur l'élevage (ILRI), des assureurs privés – Takaful Insurance au Kenya et Oromia Insurance en Ethiopie – et l’entreprise de données météorologiques aWhere.Les actions suivantes ont été planifiées :

  • la conception et le déploiement d’un système d'information météorologique mixte qui intègre les meilleurs systèmes de connaissances météorologiques scientifiques et autochtones ;
  • l'élaboration et la mise en œuvre de mécanismes destinés à promouvoir l’adoption de l’assurance bétail chez les éleveurs nomades ;
  • l'établissement d'un plan d'action pour aider les jeunes et les femmes dans l'accès aux marchés, au commerce et à l'entrepreneuriat afin d’améliorer leurs revenus et de les guider sur la voie des pratiques durables.

Grâce à CLI-MARK, des groupes ciblés de productrices sont parvenus à augmenter la production fourragère, permettant ainsi aux éleveurs pastoraux d'acheter des balles de foin à un prix beaucoup moins élevé. Tous les indicateurs démontrent que des actions « mixtes », qui font intervenir des acteurs des secteurs à la fois public et privé, ont bien plus de chances d'influer en profondeur sur les comportements et d’avoir ainsi un impact sur le long terme.

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