Le Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) confirme sa fermeture pour la fin 2020.
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Des femmes aux commandes de drones : faire de l’exception une norme en Tanzanie

Rose Funja dans les champs, avec son drone

Une jeune femme africaine prospère et développe son activité dans le domaine des drones et de la science des données (domaine à prédominance masculine). Rose Funja œuvre à la promotion de la participation des jeunes femmes aux STEM.

Rose est une pilote de drone renommée dans son pays, la Tanzanie, et même dans tout le continent africain. Pionnière dans son domaine, elle est aussi la fondatrice et directrice générale d’Agrinfo, une entreprise sociale au sein de laquelle elle forme d’autres femmes et jeunes filles au pilotage des drones. Son histoire est un véritable modèle de réussite : comme la plupart des entrepreneurs à succès, Rose a d’abord identifié un défi à relever, ici, l’accès aux outils numériques et aux filières STEM (Science, Technology, Engineering and Mathematics, Science, technologie, ingénierie et mathématiques) pour les femmes. Même si elle affirme avoir lancé son entreprise « par accident », elle avait remporté l’édition 2013 du concours Agrihack, obtenant ainsi une visibilité inédite. Avec son équipe, ils avaient ensuite décroché une deuxième place dans un concours régional, assortie du bénéfice d’un mentorat dans un centre d’innovation. Enfin, en moins d’un an, Rose avait intégré le programme Mandela Washington Fellowship et gagné une subvention de démarrage allouée par le Département d’Etat américain après avoir participé à l’initiative YALI (Young African Leaders Initiative) dans le cadre du projet « She Codes for Change » en 2014.

Rose a obtenu d’autres subventions qui lui ont permis de développer le programme « She Codes for Change » et de l’élargir aux communautés urbaines comme rurales, en ciblant aussi bien les jeunes étudiantes que les enseignantes. Elle a récemment étendu cette formation STEM au sein du réseau Impact Hubs et elle a été une force motrice dans le projet ayant permis l’ouverture du premier Impact Hub destiné aux jeunes filles en Tanzanie. Malgré ses succès, Rose n’a pas perdu de vue sa principale priorité : aider les femmes et les jeunes filles à développer leurs compétences. Elle n’oublie jamais qu’il n’y avait que deux autres filles dans sa classe d’enseignement secondaire. Plus tard, à l’université, elles étaient également très peu de femmes à suivre des cours de STEM. Lorsqu’elle est devenue enseignante, à l’Université de Bagamoyo, rien n’avait changé. Et les obstacles à surmonter pour les femmes dans leur quête d’émancipation dépassent largement le cadre de la salle de classe et des formations.

Être la seule femme pilote de drone lui rappelle constamment ces défis, qui vont de la délicate préparation pour une mission de terrain dans une zone éloignée au risque de se retrouver coincé à cause d’une panne de véhicule. Il est également difficile de travailler avec des communautés dans lesquelles les femmes ne participent pas activement aux discussions ni aux prises de décisions, alors qu’elles jouent un rôle fondamental dans le développement agricole. Rose explique que sa présence en tant que responsable principale lors de ces visites sur le terrain contraste sensiblement avec la position de ces femmes laissées de côté. « Je suis idéalement placée pour savoir quelles sont les interventions les plus efficaces tout en veillant à ce que la communauté soit impliquée, comprenne le travail accompli et la manière dont elle peut en tirer parti, précise-t-elle. S’il est vrai que le pilotage de drones est un domaine essentiellement masculin, comme la plupart des carrières dans les STEM, je crois que c’est également une opportunité pour les rares femmes qui tirent leur épingle du jeu car elles deviennent alors une priorité. »

Rose ouvre la voie à la féminisation de la profession. A travers ses nombreuses expériences – dans le monde universitaire en Afrique et en Asie ou en tant qu’entrepreneuse sociale –, elle a été en contact avec les technologies de l’information et de la communication (TIC) et les femmes dans différents contextes. Elle estime qu’il faut en faire plus pour faciliter l’accès des femmes aux outils numériques. Selon elle, « le développement d’applications offre des opportunités à ceux qui ont déjà un téléphone. Il est donc essentiel qu’elles puissent avoir accès à la téléphonie. L’électrification des zones rurales et les sources d’énergie renouvelables sont des leviers qui sont actuellement explorés, mais pas au maximum ». Elle souligne cependant que le paramètre financier reste un problème crucial et un obstacle pour les femmes. Elle observe également que les sources d’énergie alternatives, comme l’énergie solaire, peuvent faciliter l’accès des femmes aux outils numériques.

Forte de sa vaste expérience, Rose peut se reposer sur une solide compréhension des enjeux actuels. Elle ajoute : « Quand j’enseignais, je mettais généralement l’accent sur deux choses : l’aspect pratique des connaissances transmises à l’université, d’une part, et l’utilisation de ces connaissances pour résoudre des problèmes réels et concrets, en particulier au sein de la communauté vivant autour de l’université, d’autre part. En ce qui me concerne, j’aime penser que je suis partie du monde universitaire pour finalement travailler sur des problèmes de terrain. Je me suis concentrée sur le secteur de l’agriculture car il emploie 75 % de la population tanzanienne. »

Alors qu’elle travaille au lancement du premier Impact Hub de Tanzanie spécialement dédié aux jeunes filles, Rose souhaite adresser un message simple à la nouvelle génération de femmes impliquées dans les TIC : « Si d’autres l’ont fait avant vous, vous pouvez aussi y arriver. D’après les statistiques, les femmes gèrent la plupart des tâches ménagères et constituent l’essentiel de la main-d’œuvre agricole. La technologie nous offre la possibilité d’automatiser les procédés et de mieux comprendre nos activités. L’agriculture n’échappe pas à la règle. » Elle insiste enfin sur la façon dont les défis peuvent être transformés en opportunités : « Ce sont souvent les personnes les plus touchées, ici les femmes, qui trouvent les solutions pour remédier aux problèmes rencontrés. Voilà pourquoi il est essentiel de prendre part au débat […], d’être en première ligne pour relever les défis avec notre arme ultime : la connaissance.

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La présence des femmes dans l’agriculture est une réalité statistique. Les études montrent qu’elles représentent aujourd’hui 40 % de la main-d’œuvre du secteur dans les pays ACP. Bien que leur contribution soit essentielle au développement de l’économie rurale et de la numérisation, l’écart entre les sexes continue à se creuser sur les TIC. Les agricultrices éprouvent des difficultés à accéder à l’information, aux produits et services financiers ainsi qu’aux marchés. De plus, elles sont souvent tenues à l’écart de l’élaboration des politiques.

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Brastorne Enterprises, entreprise possédée par des jeunes et dirigée par des femmes, travaille au développement de solutions efficaces et adaptées pour le marché africain. Son objectif est d’offrir l’équité des chances aux communautés rurales et mal desservies. La cofondatrice, Naledi Magowe, très impliquée dans la réduction de la fracture numérique en milieu rural, a gagné une reconnaissance internationale grâce à son projet mAgri et sa première place au concours Pitch AgriHack du CTA en 2016.

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Les données ouvertes sont des données accessibles à tous, utilisées et partagées par tout le monde. Un meilleur accès aux données ouvertes peut aider les populations à façonner un avenir durable, à l’aide de solutions fondées sur des données probantes, tout en contribuant à une prise de décisions plus transparente. Pour exploiter le potentiel des données ouvertes, tout le monde doit pouvoir y accéder et les utiliser. Apprenez-en plus sur l’enquête de la Web Foundation pour savoir si les Africaines profitent aussi des données ouvertes.

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Keithlin Caroo est la fondatrice de l’association à but non lucratif Helen’s Daughters, basée à Sainte-Lucie. Le projet a vu le jour en 2006 après avoir été récompensé par le programme Empower Women Champions for Change de l’Organisation des Nations unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des Femmes (ou ONU Femmes).

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Fatma Ben Rejeb est la CEO de l’Organisation panafricaine des agriculteurs (PAFO). La PAFO est un réseau d’organisations paysannes de tout le continent africain, qui vise à améliorer la communication, la collaboration et le partage d’informations/de connaissances entre les parties prenantes. Elle est la première organisation paysanne à l’échelle du continent et constitue un instrument important pour associer directement les agriculteurs au programme africain de croissance et de développement.

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